Chanson de nuit
Lorsque la lune est vide,
Privée de sa corporalité,
Lorsque l'air est silence
Et sapience,
Et que les arbres
M'observent calmement,
Rechignant
A laisser leurs feuilles chuchoter
Ces mots de mouvement
Et d'émotion
Que je ne pourrais entendre
De toute façon,
Dans ces moments
Je suis le centre
De mon propre monde.
Je suis l'impact
De l'aigle sur le lac
Et je dessine
Hâtement
En rides oscillantes
Les contours
Et alentours
De mon environnement.
Lorsque la nuit est pleine,
Gorgée de sa corporalité,
Que les êtres minuscules
Et volant chantent
Leur changement chichement,
Lorsque je perçois
La chanson du temps
Et de l'espace
Sans la voir
Mais en l'entendant,
Je ne suis non pas l'impact
De l'aigle sur le lac,
Mais bien ces rides
Oscillantes et scintillantes,
Ces prismes lunaires
Qui décomposent
Et recomposent
La lumière de l'astre
Accessoire
En une lueur de vie.
Lorsque la nuit est mienne
Intérieure
Et imagée,
Je suis le centre
Et sa périphérie
Le cœur et la peau,
Je suis l'aigle et le lac
Engagés dans un va-
Et-vient du crépuscule.
Dans ces moments
De méditation,
J'exprime mes passions,
Mes tensions,
Et je trace en lignes sombres
Le chemin qui me mènera
Vers la lumière
Du matin.