ArnaudBarras.ch ArnaudBarras.ch

ArnaudBarras.ch

Critical, creative and digital writingEcriture critique, créative et numérique

 ? 𝞪/A
2012  

Les télécommunications

Vous ne le savez peut-être pas, mais l'étymologie de "télécommunication" est un mélange de latin et de grec: Communicatio, en latin, signifie "le fait de partager"; Tele-, en grec, signifie "loin." La télécommunication, donc, est le processus de partage d'un message avec quelqu'un qui n'est pas directement présent. Vous vous demandez peut-être en quoi les télécommunications sont liées à la notion d'organisme et environnement? Simplement, j'affirme que la technologie de la communication à distance a tendance à nous faire oublier ce qui nous entoure au profit d'une représentation d'un environnement absent. C'est en effet tout le principe du tele-, et d'une certaine manière, cela est une avancée remarquable dans l'histoire de l'humanité. Pensez au développement du commerce, de la finance, des arts et des divertissements. Tous ont substantiellement bénéficié des télécommunications. Maintenant, essayez d'imaginer des sociétés contemporaines sans les banques, sans la télévision, sans internet, sans les usines des pays d'Asie du Sud. Imaginez ce que vous ne pourriez pas faire sans le téléphone! Le développement de la télécommunication exemplifie la monstruosité du progrès! Et pourtant, malgré tous ses avantages, la télécommunication a un inconvénient majeur. Il n'est pas inhérent à elle, mais vient de ce que nous en faisons, ou plutôt de notre manque de considération de l'impact de la télécommunication sur la relation entre organisme et environnement, entre humain et monde. De par la présence d'une profusion d'information liée à des environnements absents, ou virtuels, à des mondes auxquels nous n'avons pas accès directement avec nos corps (une profusion fournie par la télécommunication), nos environnements physiques ont tendance à perdre de leur attractivité. On considère comme acquis que ce qu'on voit à la TV, ce qu'on lit sur internet, ce qu'on entend à la radio, sont plus ici que le sol sur lequel on marche, l'air qu'on respire, les murs qu'on voit constamment. Les entités télécommuniquées sont "plus ici" car par définition elles sont des choses à être partagées proactivement (vous vous rappelez de la définition de communication?), alors que notre environnement n'est pas destiné à être partagé, il est, simplement. Les messages télécommuniqués forment un simulacre d'environnement, une simulation qui pour beaucoup d'entre nous finalement remplace l'environnement physique de départ. La situation n'est pas automatiquement un problème. Cela en devient un lorsque nous oublions ce qu'il se cache derrière la télécommunication, ce que la télécommunication nécessite pour fonctionner (pensez aux composants métalliques et plastiques des objets électroniques, pensez aux énergie fossiles consommées pour le transport physique et l'énergie électrique pour le transport virtuel), et ce qu'elle fait à ce qui entoure directement beaucoup d'humain (pensez à la déforestation, à la construction de barrage, aux ondes électromagnétiques, à la pollution nucléaire, à tout ce que nous tolérons car ça nous permet de télécommuniquer). Cela devient aussi un problème quand la télécommunication est tout ce qui reste, quand l'interaction sociale est réduite à des pixels de lumières, quand l'immobilisme de l'ordinateur remplace le dynamisme des jeux d'extérieur. Dans ces cas, la télécommunication n'est plus "le fait de partager à distance", mais la simulation de vivre une vie quelque part ailleurs. L'aliénation de son environnement est la raison principale du manque de soin à son égard. Pourquoi prendre le temps de contrôler ce qu'on fait à ce qui nous entoure, si on ne sait même pas ce que c'est, ou qu'on l'ignore inconsciemment? C'est pour ces raisons que nous devons apprendre à reconnaître les différences entre les télé-environnements de l'âge de la communication et les véritables environnements que nous façonnons continuellement dans le processus de vie. La télécommunication devrait rester un message partagé à distance, et ne devrait pas devenir une simulation de vie d'un semblant d'humain dans un monde dématérialisé. Votre environnement physique devrait être au centre de votre attention, pas simplement votre TV, votre écran d'ordinateur ou votre smartphone. C'est seulement si nous redevenons tous des organismes interagissant avec un environnement physique que nous voudrons vraiment - et donc pourrons vraiment - le sauvegarder!